jeudi 26 février 2009

Le sabot algérien

Hier soir, j'ai rencontré les parents à Samia pour la première fois.

Sam voulait arrêter de mentir lorsqu'elle venait chez moi. Sa maman a été mise à l'affût de mon existence au préalable et, au moment propice, le papa a été avisé.

Il faut comprendre qu'en Algérie, il y a des forces universelles qui mènent à des situations assez loufoques. La rencontre avec les parents (chez les familles plus conservatrices - habituellement de bas niveau social) se fait lorsqu'on est prêt à demander la main de la fille. Avant cet événement, la fille qui se fait voir avec un mec est qualifiée de «pute» et se fera traiter de manière peu charitable par les hommes à qui elle appartient (pas seulement les membres mâles de sa famille. La communauté a un énorme rôle à jouer alors elle se doit de ne pas être vue dans une situation embarassante dans son quartier). Bref, la logique sous-jacente aux yeux d'un Canadien cartésien, c'est qu'on veut qu'elle prenne le premier venu et qu'elle le présente.

...bien entendu, ça ne se passe pas comme ça.

J'ai appris peu de temps après mon arrivée que le jeu national algérien est le contournement créatif des règles. On impose des lois draconiennes, mais il est convenu que tant qu'on est discret, on peut tout faire.

N'en demeure que, comme dans bien des pays (dont des pays «occidentaux» - je nommerais un qui réside tout juste au sud de ma terre natale), la virginité féminine est prisée au-delà de toute autre caractéristique. Ça a comme avantage de valoriser la consommation adolescente de Vaseline (et ça m'étonne profondément qu'on ne puisse pas trouver des lubrifiants personnels compatibles avec des condoms dans ce pays, même si les préservatifs se vendent partout) et d'élargir (jeu de mots. Dilatation. Genre) l'éventail des éventuelles pratiques sexuelles des couples légitimisés par l'état. Ça explique aussi les divans bien coussinés prisés par la gente féminine célibataire.

M'entéka.

Samia a tenté tant bien que mal d'expliquer à son papa que je suis CANADIEN, et donc qu'il n'y a ni fiançailles, ni mariage imminents. Ça a plus ou moins bien fonctionné, mais heureusement qu'elle vient d'une famille (bien que papa a 72 ans et est devenu pratiquant de la religion du coin) relativement progressiste.

Voici les grandes lignes de la soirée :

- On m'a accueilli gentiment et on a servi du thé et des gâteaux et on m'a demandé ce que je faisais comme travail alors ça a déclenché une discussion sur le fonctionnement de l'état algérien qui a duré une heure.

- Le frère de Samia (qui a servi de bouclier conversationnel) a quitté. La conversation plaisante a continué un bout.

- Lorsqu'il se faisait tard (et que Samia devait quitter pour une soirée organisée pour son boulot), la maman a dit qu'elle avait des questions sur mes «intentions». J'ai expliqué ma position.

- Le papa m'a expliqué que c'est normal qu'un couple veuille explorer la relation avant de prendre un engagement formel (positif!).

- Le papa m'a expliqué que sa première crainte était que Sam cherchait à se servir de moi pour ma citoyenneté (positif dans le sens que sa première crainte n'était pas que je me servais d'elle comme poupée de soulagement physique).

- Le papa m'a expliqué que Samia est bien plus jeune que moi. Que c'est ma responsabilité de brider ses folies. Ça a pris quelques minutes avant que je ne comprenne (et je n'ai jamais vraiment compris avant que Sam ne m'eut confirmé) qu'il faisait référence au cul. Que JE devais imposer la chasteté dans le couple, car Sam est encore trop naïve (pas positif ni négatif, mais PARFAITEMENT hilarant). Vraiment, les algériens me sont complètement étranges.

- Le papa m'a expliqué que je devrais aller voir un imam lors de mon retour à Montréal. Je croyais qu'il faisait référence au mariage et ça m'a pris quelques minutes (oui, je suis lent dans la tête) qu'on avait changé de sujet, que le mariage est secondaire, mais qu'il voulait me convertir. Chers lecteurs, je suis la personne la plus athée de la planète. Je n'avais AUCUNE idée quoi répliquer.

Alors, le papa à Samia m'a remis son Coran et nous sommes allés regarder le match du Champions League entre Liverpool (commandité par Carlsberg, donc bonne opportunité pour organiser une soirée) et Real Madrid. J'ai calé quatre bières et je me suis demandé quelles sont les conséquences à la soirée et si j'ai fait bonne impression.

Ce matin, après la salle de sports, je suis allé faire mes courses. En sortant de la superette, j'ai constaté qu'on a posé un sabot sur ma voiture. J'étais stationné du mauvais côté de la rue (ça fait presque trois mois que je vais à cette superette sans prêter attention aux côtés de rue et il y avait plein d'autres voitures de mon côté qui ont également été sabotés). J'ai donc dû me rendre au bureau de poste (oui les Canadiens. Au bureau de poste. J'comprends pu rien) pour faire apposer des timbres valant 15 $ sur la contravention et revenir et attendre que les policiers fassent le tour pour leur présenter le document et faire enlever l'entrave jaune.

Voilà. Il y a des pièges qui sont tendus à tous les algériens. On peut tout faire, tant qu'on ne se fasse pas prendre.

2 commentaires:

Lamia a dit…

Tu es cuit je crois LOl

Éric a dit…

J'aime mieux être cru. Crois-moi.

(Il y a deux calembours dans cette phrase. *schling*)